les voici
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Poème 1RécitatifIl pressent les tragédies
au rythme des timbales
campé dans ses souliers taille 27
les tragédies et les présents
trop grands pour ses mains fragiles
tout est rouge ce soir
rouge à s'y noyer
Raphaël les joues en feu
reçoit des contes de Noël
de beaux espoirs compressés
en quelques lignes
et les déchire sans savoir
que ses cathédrales sont tombées
que ses psaumes sont aphones
il apprendra cette manière d'être grave
avec son rire déjà adulte
Raphaël n'est que le héros
d'une mauvaise opérette
à la tendresse maladroite
dans son costume de petit Jésus
il tire la langue
pour attraper les flocons
qui s'échappent du ciel noir
et trébuche
ses souliers taille 27
ses grands yeux bleus
les contes qu'il ne comprend pas
les déchirements qu'il évite de comprendre
qu'importe
la radio chuchote doucement
Lasset das Zagen, verbannet die Klage
lui tire la langue
pour attraper la chaleur
qui s'échappe des étoiles
Poème 2 je me suis réfugié dans les neiges de la chambre
les murs sont blancs comme visage en hiver, ils tiédissent aux vents intérieurs, et je suis blanc comme eux, dans cet air parfumé de livres, de calme et de vide, de tout je m'espace
la fenêtre écarte les lignes de la chambre,
derrière la vitre je vois, comme Lucrèce, la tempête de l'hiver engloutir le monde, des flots de soleils rendent hirsutes les arbres, et le froid fige tout dans sa photographie
alors je me calfeutre plus profondément dans les draps blancs
des murs, et les draps noirs des choses
et je poursuis le temps de ma lecture
Poème 3Je n’avais plus marché depuis des années. Je marche, ainsi, et c’est comme une danse. Sur le sol crevé, mes pas sont des glissés et des détournés d'un autre genre. C’est-à-dire, Madame, que je marcherai toujours à côté: à côté du marché de Noël, à côté de la foule: toujours en amont ou en aval, c’est selon.
Hier, je pensais être en retard, que le soleil déjà aurait achevé sa ronde pour plonger tête première dans l’Atlantique. J’étais posté en haut de la rue des Blancs Manteaux et j’ai commencé ma ligne, donnant la mesure au monde. Le ciel s’est déchiré d’émotion: il s’est déchiré de façon dorée sur les visages laids et paisibles d’hiver.
Je dansais, et pourtant j’avais une trajectoire propre. J’allais voir cet
homme aux livres, cet homme bourru à la voix rauque, que je reconnaissais comme étant de la même substance que moi-même. Je pensais à son odeur d’encre, et puis à celle particulière - boisée - de la femme que j’allais rencontrer ensuite. Il y avait la ville, et puis moi, lié à elle par l’épiphanie de mes plis. Je me sentais
au bord de: je savais que tout déjà était dessiné mais je dessinais encore. Je dansais entre les points cardinaux de mon monde.
Poème 4Noël
comme toute nuit de neige noire
trépignera en moi
sans espace
dans la présence de traverse
- irrespirable mais
si stupéfaitement douce! -
des êtres qui ne sont pas toi
Noël
et toujours ces vents ressassent ta sensation
ce mot d'ange ce souvenir cette brûlure rejaillie
des vitraux aux lumières incandescentes
aux voix qui fument aux rires des amants péris
la ville marée coeur froid de l'étranger
qui passe
s'enfonce
dans la neige viscéralement noire
le lierre de l'absence envahissant chaque ciel, voûte, pierre, fleur, odeur, bruit
chaque pavé de vieille rue, chaque lèvre désaimée, chaque trait, chaque songe, chaque regret
Noël
ma vie roule dans les mains d'un autre monde
ce rêve aux courbes lancinantes
je traverse tes joues froides
en pensée
et toute larme inventée
toute neige triste
que ces vers tournoient
on ne sait en quel abîme indolore
(ton visage)
recrée la valse où tu t'es anéantie
comme une vapeur d'absinthe dans une veille nouvelle
vers cette vie où je n'ai plus corps
Noël
je parle je parle je parle de toi
mais qui es-tu
mon enveloppante déchirure
la fête les éclats de joie les extases même l'oubli
ne te font pas oublier
j'ai ta pâleur nouée à mes battements
et cette racine du désir sublime sinueuse
(avalée de travers dès tes premiers mots)
m'est devenue poussière mal ingérée
désespérance si profondément remuée dans la gorge
qu'elle ne paraît plus à ceux qui n'en savent rien
qu'une façon de se taire
Poème 5 Poème de noël
Les choses retournent de peu.
Tout événement est une merveille.
Ou touche, de peu, cet état de merveille.
Les branches touchent terre, ou touchent,
De si près, le sol. Le soir, tu es venue, et, de peu,
Tu as effleuré ma main. On ne peut oublier, ou peu,
Si peu, la minute au cours de laquelle