Messages : 233 Date d'inscription : 30/03/2015 Age : 33
Sujet: Re: les jolis poèmes (ou extraits) Lun 8 Juin - 21:07
Merci pour ces deux poèmes ! J'en rajoute un au premier vers inégalable.
Sonnet saluant la mort de Villers de L'Isle-Adam. Paul Verlaine
Tu nous fuis, comme fuit le soleil sous la mer, Derrière un rideau lourd de pourpres léthargiques, Las d’avoir splendi seul sur les ombres tragiques De la terre sans verbe et de l’aveugle éther.
Tu pars, âme chrétienne, on m’a dit résignée, Parce que tu savais que ton Dieu préparait Une fête enfin claire à ton cœur sans secret, Une amour toute flamme à ton amour ignée.
Nous restons pour encore un peu de temps ici, Conservant ta mémoire en notre espoir transi, Tels des mourants savourent l’huile du Saint-Chrême.
Villiers, sois envié comme il aurait fallu Par tes frères impatients du jour suprême Où saluer en toi la gloire d’un élu.
Invité Invité
Sujet: Re: les jolis poèmes (ou extraits) Mar 9 Juin - 13:00
"Aux marches du palais, Aux marches du palais, Y a une tant belle fille, Lonla, Y a une tant belle fille.
Elle a tant d'amoureux, Elle a tant d'amoureux, Qu'elle ne sait lequel prendre, Lonla, Qu'elle ne sait lequel prendre.
C'est un p'tit cordonnier, C'est un p'tit cordonnier, Qu'a z'eu la préférence, Lonla, Qu'a z'eu la préférence.
C'est en la l'y chaussant, C'est en la l'y chaussant, Qu'il y fit sa demande, Lonla, Qu'il y fit sa demande.
"La belle si tu voulais, La belle si tu voulais, Nous dormirions ensemble, Lonla, Nous dormirions ensemble.
Dans un grand lit carré, Dans un grand lit carré, Couvert de teille blanche, Lonla, Couvert de teille blanche.
Aux quatre coins du lit, Aux quatre coins du lit, Un bouquet de pervenches, Lonla, Un bouquet de pervenches.
Dans le mitan du lit, Dans le mitan du lit, La rivière est profonde, Lonla, La rivière est profonde.
Tous les chevaux du Roi, Tous les chevaux du Roi, Pourraient y boire ensemble, Lonla, Pourraient y boire ensemble.
Et nous y dormirions, Et nous y dormirions, Jusqu'à la fin du monde, Lonla, Jusqu'à la fin du monde."
fifty pazi la toute-jolie
Messages : 443 Date d'inscription : 03/11/2014 Age : 31 Localisation : Paris
Sujet: Re: les jolis poèmes (ou extraits) Lun 22 Juin - 0:23
A vingt ans c'est un tremblement De voir ses yeux dans l'eau des femmes La chambre a la parure de la mer Comme deux oiseaux qui volent ensemble s'écrasent Du silence dangereux des nids La nuit a mêlé nos âges Ô mélodie de la pierre des îles
Georges Schehadé
BLONDEUR DES BLÉS
Messages : 11 Date d'inscription : 02/06/2015 Age : 31
Sujet: Re: les jolis poèmes (ou extraits) Lun 22 Juin - 12:57
ça commence bien puis ça se gâche
BACH
Messages : 143 Date d'inscription : 24/11/2014 Age : 39
Sujet: Re: les jolis poèmes (ou extraits) Mar 23 Juin - 15:57
ça commence bien puis ça se gâche Comme deux oiseaux qui volent ensemble s'écrasent
au revoir au revoir MONARQUE DU BISOU
Messages : 553 Date d'inscription : 30/10/2014 Age : 25
Sujet: Re: les jolis poèmes (ou extraits) Mar 23 Juin - 16:25
Après-la-pluie-le a écrit:
ça commence bien puis ça se gâche Comme deux oiseaux qui volent ensemble s'écrasent
cette comparaison est invraisemblable :')
Pulsabisou
Messages : 233 Date d'inscription : 30/03/2015 Age : 33
Sujet: Re: les jolis poèmes (ou extraits) Mar 23 Juin - 17:17
tout dépend contre quoi ?
Invité Invité
Sujet: Re: les jolis poèmes (ou extraits) Mar 23 Juin - 17:42
Celui qui boit, comme a chanté Nicandre, De l'Aconite, il a l'esprit troublé, Tout ce qu'il voit lui semble estre doublé, Et sur ses yeux la nuit se vient espandre.
Celui qui boit de l'amour de Cassandre, Qui par ses yeux au coeur est ecoulé, Il perd raison, il devient afolé, Cent fois le jour la Parque le vient prendre.
Mais la chaut vive, ou la rouille, ou le vin Ou l'or fondu peuvent bien mettre fin Au mal cruel que l'Aconite donne :
La mort sans plus a pouvoir de garir Le coeur de ceux que Cassandre empoisonne, Mais bien heureux qui peut ainsi mourir.
Ronsard
Invité Invité
Sujet: Re: les jolis poèmes (ou extraits) Mar 23 Juin - 17:44
Ces liens d'or, cette bouche vermeille, Pleine de lis, de roses et d'oeillets, Et ces coraux chastement vermeillets, Et cette joue à l'Aurore pareille ;
Ces mains, ce col, ce front, et cette oreille, Et de ce sein les boutons verdelets, Et de ces yeux les astres jumelets, Qui font trembler les âmes de merveille,
Firent nicher Amour dedans mon sein, Qui gros de germe avait le ventre plein D'oeufs non formés qu'en notre sang il couve.
Comment vivrai-je autrement qu'en langueur, Quand une engeance immortelle je trouve D'Amours éclos et couvés en mon coeur ?
Ronsard
Invité Invité
Sujet: Re: les jolis poèmes (ou extraits) Mar 23 Juin - 17:45
Le printemps n'a point tant de fleurs, L'autonne tant de raisins meurs, L'esté tant de chaleurs halées, L'hyver tant de froides gelées, Ny la mer a tant de poissons, Ny la Beauce tant de moissons, Ny la Bretaigne tant d'arenes, Ny l'Auvergne tant de fonteines, Ny la nuict tant de clairs flambeaux, Ny les forests tant de rameaux, Que je porte au coeur, ma maistresse, Pour vous de peine et de tristesse.
Ronsard
Invité Invité
Sujet: Re: les jolis poèmes (ou extraits) Mar 23 Juin - 17:47
Et le plus beau de tous
Comme on voit sur la branche au mois de may la rose, En sa belle jeunesse, en sa premiere fleur, Rendre le ciel jaloux de sa vive couleur, Quand l'Aube de ses pleurs au poinct du jour l'arrose ;
La grace dans sa feuille, et l'amour se repose, Embasmant les jardins et les arbres d'odeur ; Mais batue ou de pluye, ou d'excessive ardeur, Languissante elle meurt, fueille à fueille déclose.
Ainsi en ta premiere et jeune nouveauté, Quand la Terre et le Ciel honoraient ta beauté, La Parque t'a tuee, et cendre tu reposes.
Pour obseques reçoy mes larmes et mes pleurs, Ce vase plein de laict, ce panier plein de fleurs, Afin que vif et mort ton corps ne soit que roses.
Ronsard
BACH
Messages : 143 Date d'inscription : 24/11/2014 Age : 39
Sujet: Re: les jolis poèmes (ou extraits) Mar 23 Juin - 17:51
ronsard <3 je crois que j'ai déjà posté celui avec Nicandre, mais il mérite un double post <3
fifty pazi la toute-jolie
Messages : 443 Date d'inscription : 03/11/2014 Age : 31 Localisation : Paris
Sujet: Re: les jolis poèmes (ou extraits) Mar 23 Juin - 18:04
je suis d'accord, les quatre premiers vers sont jolis (le troisième un peu moins) et le reste un peu moins mais ça semble être le lot de tous ses poèmes, deux exemples :
C'est encore une fois l'automne Le jardin court derrière ses feuilles
Personne n'est plus là : Les fenêtres les gens Mais le vent
Il y a une lune oubliée Dans le ciel comme une figure
En souvenir du bel été A boire disait une fontaine
Quand les yeux se perdent dans le sommeil Comme au fond d'un puits les visages Il vient un songe avec ses paysages Sur le dormeur de la nuit Et c'est dans un ciel noir fuyant ses étoiles Une fenêtre à l'aurore Avec une tête penchée de femme Et qui demeure dans le songe une énigme
BLONDEUR DES BLÉS
Messages : 11 Date d'inscription : 02/06/2015 Age : 31
Sujet: Re: les jolis poèmes (ou extraits) Mar 23 Juin - 19:20
On dirait qu'il écrit sur l'arche des bisous
Estherfluette COURANT D'OR
Messages : 216 Date d'inscription : 02/11/2014 Age : 460 Localisation : Razlog.
Sujet: Re: les jolis poèmes (ou extraits) Mer 1 Juil - 22:48
LA NUIT
J'ai déjà tout dit — sauf le silence, sauf la pénombre dont je longe la passerelle, et la lueur de l'aube, les douleurs d'un amour tardif, indicible. Nuit pleine, la nuit est pleine.
PAROLE DE RUINE
Je veux venir près de toi. Je ne trouve vrais ni la pierre, ni le monde ni les distances. Le coup d'aile d'un oiseau dans le ciel de grand gel dure aussi longtemps que la ville aux murs coulés de béton. Il m'a fallu me briser avant de perdre mes illusions. Aujourd'hui, je suis certain que tes cellules m'entendent quand je parle la langue aux mille sens des ruines en moi-même, mais rien que pour toi en vérité.
POÈME DE NOËL 95
[...]
Le bonheur est éphémère, mais il renaît sans cesse. On enterre les déceptions, et l'illusion repousse. Elle fleurira demain. Dans mon cœur je fais pousser pour toi des tulipes, des jacinthes, des flammes de bougie pour toi, qui es un million. Le cœur est un symbole, la fleur ne l'est pas, elle est faite de chair vivante. Tu la touches et tu es réel. Tant d'existences qui sont les tiennes. Les draps purs pour un soir de fête je les ai ouverts pour toi. Il pleut des étoiles dans notre lit, cependant que nous sommeillons.
Je relis Pentti Holappa.
Dernière édition par Estherfluette le Mer 1 Juil - 23:46, édité 1 fois
Estherfluette COURANT D'OR
Messages : 216 Date d'inscription : 02/11/2014 Age : 460 Localisation : Razlog.
Sujet: Re: les jolis poèmes (ou extraits) Mer 1 Juil - 23:17
Oh et puis
La marche à l'amour
Tu as les yeux pers des champs de rosées tu as des yeux d'aventure et d'années-lumière la douceur du fond des brises au mois de mai dans les accompagnements de ma vie en friche avec cette chaleur d'oiseau à ton corps craintif moi qui suis charpente et beaucoup de fardoches moi je fonce à vive allure et entêté d'avenir la tête en bas comme un bison dans son destin la blancheur des nénuphars s'élève jusqu'à ton cou pour la conjuration de mes manitous maléfiques moi qui ai des yeux où ciel et mer s'influencent pour la réverbération de ta mort lointaine avec cette tache errante de chevreuil que tu as
tu viendras tout ensoleillée d'existence la bouche envahie par la fraîcheur des herbes le corps mûri par les jardins oubliés où tes seins sont devenus des envoûtements tu te lèves, tu es l'aube dans mes bras où tu changes comme les saisons je te prendrai marcheur d'un pays d'haleine à bout de misères et à bout de démesures je veux te faire aimer la vie notre vie t'aimer fou de racines à feuilles et grave de jour en jour à travers nuits et gués de moellons nos vertus silencieuses je finirai bien par te rencontrer quelque part bon dieu! et contre tout ce qui me rend absent et douloureux par le mince regard qui me reste au fond du froid j'affirme ô mon amour que tu existes je corrige notre vie
nous n'irons plus mourir de langueur à des milles de distance dans nos rêves bourrasques des filets de sang dans la soif craquelée de nos lèvres les épaules baignées de vols de mouettes non j'irai te chercher nous vivrons sur la terre la détresse n'est pas incurable qui fait de moi une épave de dérision, un ballon d'indécence un pitre aux larmes d'étincelles et de lésions profondes frappe l'air et le feu de mes soifs coule-moi dans tes mains de ciel de soie la tête la première pour ne plus revenir si ce n'est pour remonter debout à ton flanc nouveau venu de l'amour du monde constelle-moi de ton corps de voie lactée même si j'ai fait de ma vie dans un plongeon une sorte de marais, une espèce de rage noire si je fus cabotin, concasseur de désespoir j'ai quand même idée farouche de t'aimer pour ta pureté de t'aimer pour une tendresse que je n'ai pas connue dans les giboulées d'étoiles de mon ciel l'éclair s'épanouit dans ma chair je passe les poings durs au vent j'ai un coeur de mille chevaux-vapeur j'ai un coeur comme la flamme d'une chandelle toi tu as la tête d'abîme douce n'est-ce pas la nuit de saule dans tes cheveux un visage enneigé de hasards et de fruits un regard entretenu de sources cachées et mille chants d'insectes dans tes veines et mille pluies de pétales dans tes caresses
tu es mon amour ma clameur mon bramement tu es mon amour ma ceinture fléchée d'univers ma danse carrée des quatre coins d'horizon le rouet des écheveaux de mon espoir tu es ma réconciliation batailleuse mon murmure de jours à mes cils d'abeille mon eau bleue de fenêtre dans les hauts vols de buildings mon amour de fontaines de haies de ronds-points de fleurs tu es ma chance ouverte et mon encerclement à cause de toi mon courage est un sapin toujours vert et j'ai du chiendent d'achigan plein l'âme tu es belle de tout l'avenir épargné d'une frêle beauté soleilleuse contre l'ombre ouvre-moi tes bras que j'entre au port et mon corps d'amoureux viendra rouler sur les talus du mont Royal orignal, quand tu brames orignal coule-moi dans ta plainte osseuse fais-moi passer tout cabré tout empanaché dans ton appel et ta détermination
Montréal est grand comme un désordre universel tu es assise quelque part avec l'ombre et ton coeur ton regard vient luire sur le sommeil des colombes fille dont le visage est ma route aux réverbères quand je plonge dans les nuits de sources si jamais je te rencontre fille après les femmes de la soif glacée je pleurerai te consolerai de tes jours sans pluies et sans quenouilles des circonstances de l'amour dénoué j'allumerai chez toi les phares de la douceur nous nous reposerons dans la lumière de toutes les mers en fleurs de manne puis je jetterai dans ton corps le vent de mon sang tu seras heureuse fille heureuse d'être la femme que tu es dans mes bras le monde entier sera changé en toi et moi
la marche à l'amour s'ébruite en un voilier de pas voletant par les lacs de portage mes absolus poings ah violence de délices et d'aval j'aime que j'aime que tu t'avances ma ravie frileuse aux pieds nus sur les frimas de l'aube par ce temps profus d'épilobes en beauté sur ces grèves où l'été pleuvent en longues flammèches les cris des pluviers harmonica du monde lorsque tu passes et cèdes ton corps tiède de pruche à mes bras pagayeurs lorsque nous gisons fleurant la lumière incendiée et qu'en tangage de moisson ourlée de brises je me déploie sur ta fraîche chaleur de cigale je roule en toi tous les saguenays d'eau noire de ma vie je fais naître en toi les frénésies de frayères au fond du coeur d'outaouais puis le cri de l'engoulevent vient s'abattre dans ta gorge terre meuble de l'amour ton corps se soulève en tiges pêle-mêle je suis au centre du monde tel qu'il gronde en moi avec la rumeur de mon âme dans tous les coins je vais jusqu'au bout des comètes de mon sang haletant harcelé de néant et dynamité de petites apocalypses les deux mains dans les furies dans les féeries ô mains ô poings comme des cogneurs de folles tendresses mais que tu m'aimes et si tu m'aimes s'exhalera le froid natal de mes poumons le sang tournera ô grand cirque je sais que tout mon amour sera retourné comme un jardin détruit qu'importe je serai toujours si je suis seul cet homme de lisière à bramer ton nom éperdument malheureux parmi les pluies de trèfles mon amour ô ma plainte de merle-chat dans la nuit buissonneuse ô fou feu froid de la neige beau sexe léger ô ma neige mon amour d'éclairs lapidée morte dans le froid des plus lointaines flammes
puis les années m'emportent sens dessus dessous je m'en vais en délabre au bout de mon rouleau des voix murmurent les récits de ton domaine à part moi je me parle que vais-je devenir dans ma force fracassée ma force noire du bout de mes montagnes pour te voir à jamais je déporte mon regard je me tiens aux écoutes des sirènes dans la longue nuit effilée du clocher de Saint-Jacques et parmi ces bouts de temps qui halètent me voici de nouveau campé dans ta légende tes grands yeux qui voient beaucoup de cortèges les chevaux de bois de tes rires tes yeux de paille et d'or seront toujours au fond de mon coeur et ils traverseront les siècles
je marche à toi, je titube à toi, je meurs de toi lentement je m'affale de tout mon long dans l'âme je marche à toi, je titube à toi, je bois à la gourde vide du sens de la vie à ces pas semés dans les rues sans nord ni sud à ces taloches de vent sans queue et sans tête je n'ai plus de visage pour l'amour je n'ai plus de visage pour rien de rien parfois je m'assois par pitié de moi j'ouvre mes bras à la croix des sommeils mon corps est un dernier réseau de tics amoureux avec à mes doigts les ficelles des souvenirs perdus je n'attends pas à demain je t'attends je n'attends pas la fin du monde je t'attends dégagé de la fausse auréole de ma vie
fifty pazi la toute-jolie
Messages : 443 Date d'inscription : 03/11/2014 Age : 31 Localisation : Paris
Sujet: Re: les jolis poèmes (ou extraits) Jeu 2 Juil - 0:02
oh mon Dieu avant de voir le nom je me disais... cette voix...
Février ATTENTISME FRIGIDE
Messages : 351 Date d'inscription : 31/10/2014 Age : 32
Sujet: Re: les jolis poèmes (ou extraits) Jeu 2 Juil - 0:30
aussi
Estherfluette COURANT D'OR
Messages : 216 Date d'inscription : 02/11/2014 Age : 460 Localisation : Razlog.
Sujet: Re: les jolis poèmes (ou extraits) Sam 4 Juil - 2:29
Les autres étés
Il y aura d'autres étés D'autres grillons feront leurs gammes dans d'autres blés On croisera sur la route d'autres dames
Un autre merle inventera une chanson presque la même Un autre monsieur se trouvera là sous cet arbre où je t'aime
Une petite fille qui n'est pas née encore Fera une poupée en coquelicot A cet endroit précis où ton corps endormi se mêle au bruit de l'eau
On dira (mais ce seront d'autres) Il faudrait bien un bon coup de pluie Ça ferait du bien aux récoltes Les mots feront le même bruit
Mais plus personne plus personne ne se servira de mon cœur à moi ni de ta voix à toi qui résonne dans mon oreille et mon corps à moi
Claude Roy
Roman russe UNE PETITE FEMME LYRIQUE
Messages : 206 Date d'inscription : 03/11/2014 Age : 109 Localisation : Perdue du côté du fleuve
Sujet: Re: les jolis poèmes (ou extraits) Sam 4 Juil - 4:15
Oh c'est vilain de m'empêcher de le poster moi-même.
ritaline
Messages : 215 Date d'inscription : 19/11/2014 Age : 31
Qui peut dire : ceci est arrivé, parce que les événements l’ont permis ? Ceci s’est passé, parce que, à un certain moment, les faits sont devenus trompeurs et, par leur agencement étrange, ont autorisé la vérité à s’emparer d’eux ?
Moi-même, je n’ai pas été le messager malheureux d’une pensée plus forte que moi, ni son jouet, ni sa victime, car cette pensée, si elle m’a vaincu, n’a vaincu que par moi, et finalement elle a toujours été à ma mesure, je l’ai aimée et je n’ai aimé qu’elle, et tout ce qui est arrivé, je l’ai voulu, et n’ayant eu de regard que pour elle, où qu’elle ait été et où que j’aie pu être, dans l’absence, dans le malheur, dans la fatalité des choses mortes, dans la nécessité des choses vivantes, dans la fatigue du travail, dans ces visages nés de sa curiosité, dans mes paroles fausses, dans mes serments menteurs, dans le silence et dans la nuit, je lui ai donné toute ma force et elle m’a donné toute la sienne, de sorte que cette force trop grande, incapable d’être ruinée par rien, nous voue peut-être à un malheur sans mesure, mais, si cela est, ce malheur je le prends sur moi et je m’en réjouis sans mesure et, à elle, je dis éternellement : “ Viens ”, et éternellement elle est là. »
Maurice Blanchot
monfiancéestle+beaujel'<3
Messages : 719 Date d'inscription : 12/11/2014 Age : 40 Localisation : Soyez cool assurez !
Voici les voix qui ne savent plus que ce qu'elles taisent
Et voici que je parle
Assourdi j'entends pourtant ce que je dis
En m'écoutant j'instruis.
Estherfluette COURANT D'OR
Messages : 216 Date d'inscription : 02/11/2014 Age : 460 Localisation : Razlog.
Sujet: Re: les jolis poèmes (ou extraits) Mer 15 Juil - 21:07
Tes yeux m'interrogent, tristes, cherchant à pénétrer ma pensée; de même la lune voudrait connaître l'intérieur de l'océan. J'ai mis à nu devant toi ma vie tout entière, sans en rien omettre ou dissimuler. C'est pourquoi tu ne me connais pas. Si ma vie était une simple pierre colorée, je pourrais la briser en cent morceaux et t'en faire un collier que tu porterais autour du cou. Si elle était simple fleur, ronde, et petite, et parfumée, je pourrais l'arracher de sa tige et la mettre sur tes cheveux. Mais ce n'est qu'un cœur, bien-aimée. Où sont ses rives, où sont ses racines? Tu ignores les limites de ce royaume sur lequel tu règnes. Si ma vie n'était qu'un instant de plaisir, elle fleurirait en un tranquille sourire que tu pourrais déchiffrer en un moment. Si elle n'était que douleur, elle fondrait en larmes limpides, révélant silencieusement la profondeur de son secret. Ma vie n'est qu'amour, bien-aimée. Mon plaisir et ma peine sont sans fin, ma pauvreté et ma richesse éternelles. Mon cœur est près de toi comme ta vie même, mais jamais tu ne pourras le connaître tout entier.
Rabindranath Tagore, Le jardinier d'amour
ritaline
Messages : 215 Date d'inscription : 19/11/2014 Age : 31
Sujet: Re: les jolis poèmes (ou extraits) Mer 15 Juil - 22:47
La chronique aurait pu s'en tenir au lieu commun : ils s'aimèrent d'une passion éternelle. Mais le secret pressenti est plus profond. Tristan et Yseult, après trois ans, se réveillent de leur désir. Trois ans : après quoi ils s'oublient, mais, dans cet oubli, c'est alors qu'ils s'approchent du vrai centre de leur passion qui, interrompue, persévère. De là leur malaise. Ils ne s'aiment plus, c'est juste, le temps en est passé, toutes leurs nouvelles rencontres semblent irréelles comme un récit qui se continuerait sans eux; ils ne s'aiment plus dans ce temps-ci, mais c'est sans importance, car la passion ne se soucie pas de ce temps, ne peut être rachetée ni apaisée par l'oeuvre du temps. Cela ne veut pas dire qu'ils revivent leur histoire et, désormais sans amour, sont ramenés par la nostalgie de leurs souvenirs vers des jours qu'ils ne pourraient plus revivre et qui leur ôteraient le goût de vivre des jours nouveaux; ce n'est pas une affaire de psychologie. Leurs vicissitudes nous renvoient d'abord à un autre mouvement. Quand l'absolu de la séparation s'est fait rapport, il n'est plus possible d'être séparé. Quand le désir s'est éveillé de par l'impossibilité et de par la nuit, le désir peut bien prendre fin et le coeur vide s'en détourner : dans ce vide et dans cette fin, dans cette passion rassasiée, c'est l'infini de la nuit elle-même qui continue de se désirer, désir neutre qui ne tient compte ni de toi ni de moi, qui apparait donc comme un mystère où sombre le bonheur des relations privées, échec pourtant plus nécessaire et plus précieux que tous les triomphes, s'il tient cachée et réservée l'exigence d'un rapport différent. Peut-être, derrière l'histoire de Tristan et d'Yseult, faut-il saisir cette ombre : l'oubli est l'espace muet, fermé, où erre sans fin le désir; là où quelqu'un est oublié, là il est désiré; mais il faut un profond oubli. L'oubli : le mouvement d'oublier : l'infini qui s'ouvre, se fermant, avec l'oubli - à condition de l'accueillir, non par la légèreté qui libère la mémoire de la mémoire, mais, dans le souvenir même, comme le rapport avec ce qui se cache et que nulle présence ne saurait retenir.
M. Blanchot, L'ENTRETIEN INFINI
pan POETE DES PRAIRIES
Messages : 471 Date d'inscription : 31/10/2014
Sujet: Re: les jolis poèmes (ou extraits) Jeu 16 Juil - 13:54